Deux humanistes d'envergure, morts à quelques jours d'intervalle. Nous changeons vraiment de siècle.
Plaisir d'entendre ce que dit G. Tillon sur la gentilesse, l'hospitalité des gens des Aurès, et tout ce qu'on apprend d'abord quand on est un vrai anthropologue : aimer ceux qui nous accueillent chez eux, ne pas les instrumentaliser, respecter leur personne et apprendre une approche du monde, une philosophie de la vie. Garder sa gentillesse et sa disponibilité pour le monde. Avoir de vraies conversations profondes, dans les hautes montagnes où on connaît le prix de la vie.
Voilà ce que met le site de France Culture rediffusant les entretiens avec Jean Lacouture :
http://www.radiofrance.fr/chaines/france-culture2/emissions/avoixnue/
Germaine Tillion,
Combats de guerre et de paix
Paris, Seuil, « Opus » - 2007
Devenue centenaire en 2007, Germaine Tillion a eu un destin exemplaire et a produit une oeuvre remarquable. Son désir de comprendre les hommes et leurs sociétés lui a permis de devenir une ethnologue et une historienne exigeante. Son sens irréductible de la justice en a fait l'une des premières résistantes en France, en 1940 - un combat interrompu par son arrestation et sa déportation à Ravensbrück. Au moment de la guerre d'Algérie, l'ethnologue spécialiste de ce pays ne peut rester indifférente : elle emploie toute son énergie pour empêcher l'horreur et agir.
Sans jamais se prendre pour une incarnation du Bien, Germaine Tillion a écrit l'une des pages les plus lumineuses de l'histoire de France au XXe siècle. Combats de guerre et de paix contient trois de ses grands ouvrages : À la recherche du vrai et du juste, qui réunit l'ensemble de ses interventions dans la vie publique (1941-2000) ; L'Afrique bascule vers l'avenir, une analyse de la situation algérienne publiée en 1957, complétée en 1999 ; enfin Les Ennemis complémentaires, son livre sur la guerre d'Algérie paru en 1960, qu'elle continuera de réécrire jusqu'en 1998. La réédition de ces textes a été coordonnée par Tzvetan Todorov, le président de l'Association Germaine-Tillion.
« À chaque instant décisif de sa vie, à chaque étape cruciale de la nôtre, Germaine Tillion s'est trouvée à l'endroit qu'il fallait, parce qu'il le fallait, sans la moindre justification et même sans l'ombre d'une évocation d'un quelconque impératif moral... Cela lui a permis de découvrir des traits de lumière au cœur de la barbarie la plus atroce. » Jean Daniel
- 4e de couverture.
Germaine Tillion,
Il était une fois l'ethnographie
Paris, Seuil, « Points. Essais » - 2004, nouv. éd.
Le passé de résistante et de déportée de Germaine Tillion fait trop souvent oublier qu'elle fut, et demeure, une ethnologue de renom, spécialiste de l'Algérie. Entre 1934 et 1940, elle passe plusieurs années dans les Aurès, cette région de l'Algérie qu'elle qualifie elle-même « d'oubliée de Dieu et des hommes ». C'est le récit de sa vie de communion avec la population nomade qui est ici présenté : vie de découvertes mais aussi de solitude, dans des campements austères, des jours entiers passés sans voir âme qui vive. Ce n'est pas sans humour que Germaine Tillion décrit également le petit monde des fonctionnaires coloniaux. À la fois témoignage-récit d'une vie d'ethnologue et essai sur les nomades, leurs rites et leur imaginaire, ce livre nous fait découvrir les années d'initiation d'une grande « mère Courage » de notre siècle.
- 4e de couverture.
Germaine Tillion,
Le Harem et les cousins
Paris, Seuil, « Points. Essais » - 1982
Un classique sur la condition féminine dans le pourtour méditerranéen.
- 4e de couverture.
Germaine Tillion,
L'Algérie aurésienne, collab. Nancy Wood
Paris, La Martinière - 2001 « Ne pas croire qu'on sait parce qu'on a vu ; ne porter aucun jugement moral ; ne pas s'étonner ; ne pas s'emporter ; vivre de et par la société indigène ». Ce sont les enseignements que la jeune ethnologue, Germaine Tillion, adopte lorsqu'elle s'installe en Algérie dans une tribu berbère entre 1934 et 1940. De sa découverte de l'Aurès et de sa rencontre avec ce peuple semi-nomade, elle offre une vision précieuse et fugitive d'un mode de vie aujourd'hui presque disparu. Pour avoir côtoyé ces hommes et ces femmes aux rôles si distincts et vécu de leur économie précaire faite de transhumance, Germaine Tillion explore dans ce livre les paysages et les traditions qui caractérisaient la région de l'Aurès. Ethnologue de terrain, elle se révèle aussi une grande humaniste.
- 4e de couverture.
Germaine Tillion,
Ravensbrück
Paris, Seuil, « Points. Histoire » - 1997, nouv. éd. augm
Germaine Tillion, Jean Lacouture,
La traversée du mal : entretiens avec Jean Lacouture, prés. Geneviève de Gaulle Anthonioz
Paris, Arléa, « Arléa-poche » - 2000
Geneviève de Gaulle-Anthonioz, qui a connu Germaine Tillion à Ravensbrück, termine sa présentation de La Traversée du mal par ces mots :
«Voici donc près de soixante ans que tu nous apprends à regarder, à écouter, à essayer de comprendre... Toujours avec bienveillance, souvent avec compassion. Tes camarades ont croisé dans ton escalier tes amis berbères, des officiers de parachutistes et des combattants algériens du FLN, le général de Gaulle a été attentif à ce que tu lui communiquais.
Quelle chance extraordinaire d'avoir "traversé le mal" à tes côtés, puisqu'en te voyant nous pouvions croire au bien, puisque nous pouvions encore espérer. »
- 4e de couverture.
Jean Lacouture,
Le témoignage est un combat : une biographie de Germaine Tillion
Paris, Seuil, « La librairie du XXe siècle » - 2000
Parce que le siècle qui s'achève fut plus qu'aucun autre lardé de crimes collectifs, il lui faut des témoins. Et parce que l'imposture, soudée au crime, lui a survécu, il importe que ces témoins soient, par l'expérience, la culture, le désintéressement et le courage, dignes de foi.
En voici un, qui étudie depuis bientôt quatre-vingt-treize ans les fureurs du temps, en éprouve sur elle les effets, et sait, de chaque épreuve affrontée, nourrir ses analyses du mal à venir. Des vices du régime colonial aux horreurs du système concentrationnaire, et de la pratique de la torture à l'usage du terrorisme ou de l'esclavage, elle a su éclairer l'une par l'autre les atteintes faites au genre humain, et créer une science de l'épreuve.
C'est pourquoi Jean Lacouture, qui la connaît, l'interroge et l'admire depuis plus de quarante ans, a voulu écrire la vie de Germaine Tillion, ethnographe, résistante de 1940, déportée à Ravensbrück, sociologue du nazisme, interlocutrice des combattants algériens, ennemie de la torture, avocate de l'émancipation de la femme méditerranéenne - vie qui manifeste à grands périls courus que tout témoignage est un combat, avec l'autre et pour l'Autre.
- 4e de couverture.
Nancy Wood,
Germaine Tillion, une femme mémoire : d'une Algérie à l'autre, trad. Marie-Pierre Corrin
Paris, Autrement, « Mémoires » - 2003
Tzvetan Todorov (ed.),
Le siècle de Germaine Tillion
Paris, Seuil, « Essais » - 2007
Le XXe siècle, qui aura vu la réalisation d'exploits technologiques insoupçonnables et d'actes de barbarie effroyables, nous laisse en héritage l'image de quelques figures exemplaires. Parmi elles, en France, celle de Germaine Tillion, qui fête ses cent ans en 2007.
Ce qui distingue d'abord cette grande dame, c'est un engagement égal dans l'action publique et dans le travail de connaissance. Du côté de l'action : Résistance, déportation, lutte contre la misère en Algérie, contre le terrorisme et la torture au moment de la guerre d'indépendance. Du côté de la connaissance, un regard d'historien parmi les plus lucides sur la déportation et sur la Résistance, et une approche ethnologique des plus novatrices.
Tout au long de sa vie, Tillion a cherché à se rapprocher du Vrai et du Juste. Si l'on ajoute à cela qu'elle n'a jamais voulu se donner en exemple aux autres ni leur faire la morale, qu'elle a su ne jamais prendre trop au sérieux les conventions de la vie publique, qu'elle a trouvé le moyen de faire face à l'adversité en plaisantant, même en chantant, on comprendra qu'elle est bien l'une des figures les plus lumineuses du sombre siècle qui s'est achevé.
Le Siècle de Germaine Tillion contient trois types de contributions : une série d'études et d'hommages écrits par de nombreux auteurs français et étrangers ; des textes de Tillion elle-même, qui n'avaient encore jamais été repris en volume et enfin, une documentation complète sur sa vie et son œuvre.
- 4e de couverture.
Christian Bromberger, Tzvetan Todorov,
Germaine Tillion : une ethnologue dans le siècle
Arles, Actes Sud, « Bleu » - 2002
Dans ce début de XXIe siècle, déjà si plein de bruit et de fureur, la figure de Germaine Tillion peut nous servir de repère.
Connue pour ses engagements, notamment dans la Résistance et à propos de la guerre d'Algérie, Germaine Tillion reste en revanche bien trop méconnue comme ethnologue.
À l'occasion de la 1ère Conférence Germaine-Tillion d'anthropologie méditerranéenne qui s'est tenue à Aix-en-Provence en mars 2002, Tzvetan Todorov a écrit ce texte qui éclaire l'œuvre-vie de Germaine Tillion.
Christian Bromberger nous révèle quant à lui l'immense apport de Germaine Tillion dans la connaissance du monde méditerranéen. Le Harem et les cousins, qu'elle a écrit, est une étape très importante pour comprendre les formes de la parenté et la situation des femmes en Méditerranée.
"Si l'ethnologie, qui est affaire de patience, d'écoute, de courtoisie et de temps, peut encore servir à quelque chose, c'est à apprendre à vivre ensemble." N'est-ce pas ce dont nous avons le plus grand besoin aujourd'hui ? Ce livre, enrichi de photographies inédites de Germaine Tillion, répond à cette attente. T. F.
Merci pour cet hommage à Germaine Tillion. Elle fait partie des "saintes" au sens auquel je l'entends, c'est-à-dire des modèles et des références qui peuvent nous guider dans notre vie, nous inspirer dans la relation et dans l'action. ( Comme Abd el Kader, Mouloud Feraoun, Mgr Romero ou Helder Camara, et bien d'autres). Nous devrions tous lire et relire " le harem et les cousins"" il était une fois l'ethnographie" et ses autres ouvrages passionnants pour comprendre notre temps à partir de l'analyse de la manière dont nos comportements et nos modes de vie se sont construits.
Rédigé par : Daniel Gall | 27 avril 2008 à 12:21