Plusieurs sites diffusent les restaurations des greniers que j'ai conduites, voire des photocopies de mon livre sur les greniers. Je m'en réjouis. Il faut que les communautés elles-mêmes prennent en charge leur patrimoine et restaurent ou restituent comme nous l'avons fait à Inoummar en 2005, à Aguellouy depuis 2003, à à Id Issa en 2007 et également encore à Aguellouy.
Moi-même je voudrais poursuivre ce que j'ai entrepris, mais c'est un immense travail et souvent les sites sont inaccessibles. Je ne peux pas me battre contre tout, trouver les moyens, mettre en oeuvre les bonnes conditions de restauration, bien recruter. M'assurer qu'il y ait un équilibre social sur place.
http://viajarpormarruecos.blogspot.com/2010/09/el-ighrem-de-aguelluy.html
Par contre, il y a une tendance récente, mis en valeur dans un grand quotidien français, qui voudrait faire de ces destinations des "lieux uniques", "authentiques", etc. malheureusement en les dévoyant : dormir au grenier, y déjeuner sous les chandelles, etc.
C'est méconnaître les lieux, les folkloriser et nier leur sacralité. Enfin, c'est oublier que dans ces lieux il n'est pas question de faire ses besoins naturels, ceci était proscrit dans les chartes de greniers, ni de les souiller d'une quelconque façon. Certains greniers possèdent une mosquée , d'autres des tombeaux de saints. On dira, encore une puriste sectaire ! Je répondrai, quel est l'intérêt de ce genre de "musts" si ce n'est de faire surpayer une destination à une clientèle en mal de découverte. Dans ces cas-là, pourquoi ces retombées économiques ne profitent qu'à une seule main ? Dans des régions par ailleurs très pauvres, où la seule nuit en ces lieux (le "produit" est tout de même vendu près de 1000 euros la nuit !) pourrait équivaloir à payer les factures d'eau courante de tout le village pour l'année...
Il faut donc réfléchir avant de s'engouffrer dans cette financiarisation de lieux qui sont aussi importants qu'un temple aux yeux de la population. Vous viendrait-il l'idée d'aller déjeuner dans la Sainte-Chapelle à Paris ou de dormir dans la crypte qui abrite le tombeau des rois de France de la cathédrâle de Saint-Denis ? Respecter les croyances locales est un minimum me semble-t-il. On en appréciera que mieux ces espaces. Mes livres expliquent pourtant en détail l'institution du grenier collectif.