La ville ancienne de Tiznit est connue par des textes, mais aussi par son classement, dès 1933 de cité saharienne bâtie en terre et enserrée de murailles basses caractéristiques, englobant jardins et petits hameaux appelés « ksebt » correspondant à l’implantation de grands lignages anciens autour de points d’eau. Les images d’archives rendent bien compte de cet âge d’or où une unité bâtie et paysagère caractérisait la ville et où la « modernité » et sa cohorte de formes artificielles et exogènes restait timide.
Cette distinction par rapport aux autres médinas du Royaume doit être comprise et en faire une force. Tout doit être mis en œuvre pour vraiment préserver à la fois l’ensemble et les particularismes : dans ses remparts, dans ses tombeaux sahariens, dans ses mosquées simples et austères, dans certaines de ses typologies spectaculaires (Perches de bois des minarets, parements pyramidaux, rues couvertes en matériaux traditionnels, portes et porches ornés,…), toutes les spécificités doivent être soignées et un seul enduit chaux-terre doit être appliqué sur l’ensemble du bâti de la médina pour unifier l'ensemble et lui permettre de rester une "cité saharienne".
Nous avons commencé par des projets qui seront présentés au fur et à mesure de leur réalisation : Jardin du Quartier Lmers, Souk Assil, Ain Aqdim...
Tout un travail d'explication de la ville est proposé ainsi que d'autres séries de sensibilisation qui ont commencé et qui se prolongent. Voici les premiers modèles (ci-dessus, entre autres documents nombreux) proposés aux citoyens et un accompagnement se fait déjà d'une part par la ville, sous la houlette de Ousted Ouammou, et d'autre part par les associations, notamment Amoudou.
Première réunion : mercredi 14 mai au centre culturel Mers, 18H présentation des actions, explication, sensibilisation. Objectif, les premières ruelles prises en mains et concours de la plus belle façade. L'appui aux associations.
L'enjeu est de taille : Le paysage urbain joue un grand rôle au niveau de l’image de la médina. Malheureusement, la sobriété des façades et la profondeur historique de cette cité est entachée par le manque d’entretien, l’apparition de portes métalliques ou de revêtements de façade inadéquats tel que le carrelage ou le granito... Cette tendance (rejet de son identité pour une identité artificielle de néo-citadin) interpelle et exige une approche spécifique, en mesure de faire valoir les valeurs endogènes de l’espace intramuros.
À ce jour, les relevés des monuments religieux et des demeures par quartier a permis de dégager des spécificités réellement en péril et que seul un œil averti de spécialiste habitué au patrimoine de l’Anti-Atlas peut déceler. La ville de Tiznit est une synthèse d’apports tout à fait intéressants à mettre en valeur. Malheureusement, ils sont combattus par l’ignorance et la peur de ne pas posséder un lieu suffisamment prestigieux, trop de propriétaires préfèrent les abattre. Quand le lieu ne colle pas non plus à l’idée touristique que le propriétaire se fait, alors, il va chercher d’autres formes à Marrakech ou Fès, souvent galvaudées et enlaidies par une normalisation stérile, elles s’avèrent plus coûteuses et sans intérêt pour la ville.
Plusieurs actions peuvent être entreprises afin d’endiguer les horreurs de ciment. La protection de ce patrimoine vivant qui constitue un tissu bâti ancien est très difficile. La constitution de comités de quartiers - à l'image des inflas de la tamzgha - autour d’associations seront un atout pour la participation à l’entretien des espaces et à leur compréhension. Pour temporiser des prescriptions qui pourraient être mal comprises, une sensibilisation à l'esthétique locale, à la sécurité et à la salubrité devra accompagner ces décisions. Mais aussi un concours avec dotations préalables, et expositions, pourra être lancé, pour mettre en valeur l’effort des particuliers et des services publics pour respecter l’héritage. Plusieurs concours seront lancés (photos de portes anciennes, portraits de personnes actives, ou d’éléments et artefacts architecturaux, animations, concours de dessin), viseront à favoriser l’attachement de la population à son quartier. Les critères étant de cultiver une identité vraie et des formes locales ou d’imiter les anciens dans leurs mises en œuvre mais sans les galvauder. Il faut éviter le pastiche et le clinquant pour une ville comme Tiznit. Un soin tout particulier de signalétique accompagnera chaque gagnant pour le doter d’une plaque mettant en valeur sa famille et le travail de restauration de leur demeure.
Dans le même sens, pour sauver les quelques demeures qui sont encore debout de la pression anarchique des particuliers sur le foncier, nous avons procédé à l’inventaire systématique de demeures de caractère, en proposant en sus, à tout particulier désireux de faire un projet de maisons d’hôtes ou de tout autre projet visant à conserver le bâti originel, une assistance technique (gratuite) à projet. Car il faut conseiller fortement à un citoyen qui possède une demeure ancienne, de conserver sa façade, ses portes, les hauteurs originelles, voire des détails de mise en œuvre intérieures - les plans anciens sont de plus en plus rares - qui peuvent être stabilisés.
Merci d'avoir enrichi mon regard sur Tiznit. Curieusement, il m'avait échappé que cette cité était autrefois une bourgade rurale (ksar) avant de devenir une ville (commerces et services). La présence de la palmeraie aurait dû pourtant m'amener à cette évidence historique.
Je vous remercie aussi d'avoir pointé certaines spécificités architecturales de cette ville. Depuis la réunion de mercredi soir, je ne peux traverser de village sans regarder les portes.
J'ai aussi été impressionné par la conscience et la motivation locale concernant la préservation (restauration, réhabilitation) du patrimoine (matériel et immatériel) de cette ville.
Bravo pour le projet de création du futur musée national, maison de pays ... Longue vie à la charte architecturale et paysagère de Tiznit telle que vous l'avez élaborée.
Enfin chapeau pour votre énergie et persévérance. Il faut une détermination incroyable pour mener de tels projets. Continuez encore ... en préservant votre santé et votre entourage familial.
Rédigé par : Dan | 18 mai 2014 à 23:40