Salima Naji

ll s'agit ici d'un projet global initié il y a désormais trois ans. Les projets se construisent alors sur la durée durant de longs échanges pour faire émerger une vision qui donne un sens profond à un projet : SAVOIR Où L'ON VA. Ici la rencontre fortuite d'un groupe des femmes en plein maaruf de l'Annayir fut déterminante. Le projet fut relayé par MM. Mohamed Faïz, le président de la commune. Les chantiers patrimoine sont toujours ingrats et longs, ils nécessitent une patience infinie et beaucoup de science constructive locale que ce soit depuis la partie architecture comme depuis les "petites mains", essentielles. En effet, il faut recruter une main d'oeuvre locale, réfléchir avec elle sur les techniques les plus appropriées, les moderniser éventuellement pour assurer une plus grande pérennité. Il faut par ailleurs mobiliser les matériaux locaux, éventuellement réouvrir une carrière.

La construction est une responsabilité sociale partagée. Ces valeurs s'incarnent dans cette architecture de la justesse, du respect de l'environnement et des hommes à l'inverse de tout ce qui se fait aujourd'hui souvent par vanité. Point de démesure ou d'hybris, seulement une succession de gestes simples qui permettent de créer un espace public de qualité. La satisfaction de pouvoir regarder des adultes discuter, des enfants jouer... L'espace public, encore et toujours, rendu à tous. 

Certains êtres particulièrement intelligents pensent que tout ceci s'obtient très facilement. Tout est extrêmement difficile au contraire, c'est un art que de reconstruire c'est évident, mais il est aussi une autre difficulté qui nécessite un doigté exemplaire, c'est d'être en mesure de diriger son groupe vers un résultat probant. Ceci s'obtient par des efforts répétés presque chaque jour et un choix radical de ceux qui œuvrent ; et une gestion lente, patiente, exigeante. C'est pour cela que la plupart se détournent des procédés dits traditionnels. Mais qui peut mesurer mes efforts, franchement qui ? Je totalise 25 missions sur le site et j'ai dû mettre mes propres équipes pour obtenir ces résultats. C'est aussi cela l'engagement dans ce pays. Avoir conscience de l'importance de sites et faire en sorte qu'ils ne disparaissent pas même si cela signifie toujours et toujours un peu plus de sacrifices.

Architecture d'aujourd'hui N°408

"Fort d’une première participation remarquée à la dernière Biennale d’architecture de Venise, le Maroc retrouve aujourd’hui sa place sur la scène architecturale internationale...

"Au tournant des années 2000, le Maroc renoue avec la croissance économique et l’ouverture politique, une évolution perceptible sur la scène architecturale. Jusqu’alors marquée, depuis les années 1980, par une image orientaliste destinée aux touristes, l’architecture fait désormais l’objet de démarches véritablement contemporaines. Respectueux d’un héritage qui comprend autant la référence moderne que le monde arabo-musulman, les projets portés par la nouvelle génération d’architectes marocains rendent compte d’enjeux diversifiés, mais avant tout d’un souci aigu du contexte. Disponible en kiosques depuis le 18 septembre, le numéro 408 de L’Architecture d’Aujourd’hui rend compte, au Maroc, d’une identité plurielle en devenir. Une identité à laquelle l’architecte Tarik Oualalou préfère la notion de familiarité, qui implique de « travailler par évocation plutôt que par figuration » et renvoie à la mémoire, loin d’une « simplification stylistique ». Mémoire que l’architecte Salima Naji s’attache à réhabiliter en innovant des techniques de construction traditionnelles. Combinant sans complexes tradition, modernité et contemporanéité, l’architecture au Maroc est avant tout affaire de contexte et de climat. Enfin, parmi les différents sujets explorés à l’occasion de ce numéro, le désert marocain se révèle un véritable laboratoire urbain et la médina, une figure urbaine des plus résilientes qui a su évoluer au fil du temps. À l’heure de la démocratisation technologique, nous avons choisi de terminer notre étude et d’élargir la réflexion, en questionnant le devenir d’une architecture contemporaine en Afrique, qui en alliant la main et la machine tende à enrichir la profession d’architecte" (Edito Emma Borne).

http://www.larchitecturedaujourdhui.fr/shop/index.php?id_product=82&controller=product&id_lang=1